Je suis passé à la Fnac pour fouiller dans les bacs à soldes et j'ai entendu la musique qui passait... comme ça m'a bien plu j'ai demandé au chef de rayon ce que c’était et il m'a dit que c'était ce nouveau disque dont j'attendais pas grand chose: la collaboration entre Broadrick et Kozelek qui justement jouait un concert en passe d'être complet le lundi qui suivait alors j'y suis allé... et j'ai plutôt bien aimé me laisser balader par la logorrhée du faussement antipathique Mark Kozelek soutenue par la guitare du sympathique Justin Broadrick et la batterie du non moins sympathique Steve Shelley pendant 2h30: d'aucun(e) aura trouvé ça un peu long et chiant mais c'est compréhensible.
RAPPEL
Familier du travail de Justin Broadrick avec ses nombreux projets j’ai souvent été déçu par Jesu (un comble !), tant il a pu cumuler redites sur disque et ennuis techniques en live. Il n’en reste pas moins que le bonhomme a du talent et des idées à revendre, comme en témoigne cette toute dernière collaboration avec Mark Kozelek a.k.a. Sun Kil Moon, ancien leader de Red House Painters, et artiste indie-folk à la réputation vaguement sulfureuse.
RépondreSupprimerSi la collaboration entre les 2 projets ne m’évoque rien a priori, c’est lors d’un passage inopiné à la Fnac des Halles pour fouiller les bacs à soldes que j’y suis exposé : « c’est le dernier Jesu avec Sun Kil Moon, super album » me dit le vendeur « ça joue lundi au Divan Du Monde, j’ai déjà ma place » renchérit-il… Jesu / Sun Kil Moon (le nom du projet, en toute simplicité), vient donc à Paris présenter son disque fraichement sorti et plutôt bien accueilli, dans un Divan Du Monde affichant complet pour l’occasion.
La première partie est assurée par My Name Is Nobody, un type armé de sa seule guitare baryton et de sa voix, qui nous livre folk électrifié et sombre, essentiellement nonchalant et plus rarement explosif. « Je suis “My Name Is Nobody”, mais c’est pas mon vrai nom : je m’appelle Vincent. ». Content d’être là mais pas si visiblement que ça, Vincent nous ballade donc dans un univers intimiste et minimaliste plutôt morose avant que la formation étendue de Jesu / Sun Kill Moon investisse la scène du Divan Du Monde.
RépondreSupprimerFormation étendue car ce soir Broadrick et Kozelek sont accompagnées d’un guitariste (Nick Zubeck, proche de Kozelek) et d’un batteur, en la personne du talentueux Steve Shelley de feu-Sonic Youth.
Le son est bon et la lourdeur de la guitare de Broadrick est véritablement propulsée par la dynamique percussive de Shelley alors que Kozelek se lance dans sa première logorrhée de la soirée, sa voix se retrouvant parfois doublée par celle du second guitariste.
Si le premier morceau est une reprise de Sun Kil Moon, le groupe enchaîne sur les titres de l’album fraichement sorti quasiment dans l’ordre, entrecoupés d’interventions plus ou moins provocatrices d’un Kozelek faussement bougon et vraiment enjoué : il houspille les photographes et répète à l’envie ne pas avoir envie d’être pris en photo, s’en prend au public en général qu’il trouve trop respectueux en lui reprochant de ne pas avoir justement de raisons de le prendre à parti, lance des saillies plus ou moins drolatiques à propos des t-shirts qu’il voit dans le public (« Pavement, I love that band ! Oh Neurosis, I love them too ! »), fredonne « Teenage Riot » de Sonic Youth quand il présente Steve Shelley, en fait des caisses lorsqu’il évoque son ancien groupe Red House Painters, mentionne la reprise du morceau « Like Rats » de Godflesh en présentant Justin Broadrick (dont c’est un des groupes)…
Définitivement en verve et visiblement ravi d’être sur scène (seul bon moment pour lui en tournée de son propre aveux), il occupe l’espace et captive un auditoire tout disposé à se laisser balader, se voyant même offrir des fleurs par une spectatrice. L’ambiance est bonne, et vire au potache lorsqu’il demande à ses musiciens de se lancer dans le « Dueling Banjos » de la BO de Delivrance, réclame que quelqu’un offre aussi un cadeau à Broadrick, ou harangue un chevelu qui se bouche les oreilles en lui expliquant qu’il n’est pas obligé de rester devant, ni encore moins de rester tout court.
S’il se met en scène et raconte sa vie dans ses chansons, il n’en reste pas moins touchant dans les thématiques qu’il aborde, évoquant les attentats de Novembre et dédiant le sublime morceau « Exodus » aux parents des victimes, exhortant un public ému à chanter avec lui le refrain « For all grieved parents, I send you my love », et dressant un parallèle avec la situation dramatique dans son propre pays, la NRA et les tueries de masses récurrentes.
Le personnage est complexe, versant tantôt dans le sérieux d’un pathos qu’on espère non simulé, tantôt dans l’ego-trip assumé (avec les lectures de deux longues lettres de fans heureusement en musique au cours du set), et à d’autres moments dans un second degré tonitruant… toujours est-il qu’il captive tout du long des 2h30 de concerts, à peine entrecoupées du rappel prévu et annoncé juste avant les 20 minutes de « Beautiful You » : « on va encore jouer un morceau de 20 minutes, et si vous nous rappelez on reviendra pour 2 ou 3 morceaux de plus », rappel qui nous offrira d’ailleurs une reprise de Elliott Smith plutôt réussie ainsi qu’une autre, moins convaincante, de l’inévitable David Bowie fraichement décédé (et qui nous aura heureusement épargné le non moins inévitable « Love You All The Time » des Eagles Of Death Metal).